dimanche 27 mars 2011

Marianne !

Le thé

Il est tout à fait temps de vous parler de Marianne, je ne peux pas l'appeler Josette, Laure ou Odette, non, c'est Marianne, son vrai prénom, impossible d' inventer une Mireille qui ne serait pas ma Marianne...Une belle femme de plus de quatre-vingts ans, cheveux blancs comme un nuage, les yeux vifs, une répartie spontanée, des idées à revendre, un regard neuf sur le monde, et si vous passez par là vers 17h vous aurez droit à un verre de thé, vous apportez les petits gâteaux, c'est le cake aux fruits qu'elle préfère, et la fête sera complète...

Le cognassier

J'avais aperçu Marianne un après-midi, au beau milieu de sa prairie, dans son verger, uniquement planté de pommiers d'essences différentes, et d'un énorme cognassier.

Elle était là, à côté de son arbre préféré, celui qui donne les Reines des Reinettes, debout, bien plantée sur sa canne, mais pour la génuflexion, impossible... Elle avait un panier d'osier au bras, et prétendait ramasser les pommes mûres, tombées à terre...

J'avais fait le tour de sa belle maison berrichonne pour admirer sa pièce de terre, verte comme un tapis artificiel, les pommiers luisaient de toutes leurs pommes, c'était beau comme une photo d'art.

Le verger

Pour la cueillette elle portait un pantalon confortable, orange, qui tranchait sur l'herbe acidulée, elle regardait les pommes et se demandait comment elle allait faire pour les atteindre...

Je me suis précipitée : Bonjour madame, voulez-vous que je vous aide à les ramasser ? Volontiers, je n'y arriverai jamais, tenez, passez par derrière, le portail est ouvert, je vous laisse faire, à tout de suite...

Voilà comment nous nous sommes connues, dans son verger magnifique, elle en orange et canne, et moi avec appareil photo et sac à dos.

Les pommes

Le même éblouissement m'a saisi quand je suis entrée dans sa maison, basse et douce, une grande terrasse m'attendait, des fauteuils bien disposés autour d'une belle table de jardin donnant sur le vert horizon de ses terres, un grand moment de beauté... J'avais hâte d'entrer en contact avec la dame, parler, faire des photos, et même cueillir des pommes... Mes préférées.

Nous avons fait connaissance, pendant deux heures nous sommes restées sous le soleil tamisé par la grande toile du parasol... Comme un éclair, les deux heures sont passées, nous nous étions trouvées, comme on dit... Vers le soir j'ai pris le panier pour ramasser les pommes, j'ai marché dans le vert, jusqu'aux arbres du Paradis... Marianne, je mets les pommes près des courgettes, pour la compote vous devriez en avoir assez...

Revenez me voir Danielle, revenez chercher des pommes, nous prendrons le thé.

Elle m'a accompagnée jusqu'à la petite barrière de bois, plusieurs fois je me suis retournée, un grand signe de la main, et j'étais loin.

Tous les amis qui sont venus me voir dans ma campagne, je les ai conduit chez Marianne, la conversation s'est élargie, nous avons parlé, nous avons ri, nous avons bu du thé...

La fenêtre

Le mois a passé, avec des visites thé petits gâteaux... Le matin, tard, je lui faisais un petit coucou de loin, quand je la voyais à sa fenêtre, émergée d'une nuit avec sommeil agité et difficile à trouver...

Deux années de location tout près de chez elle se sont succédées, enrichissant notre relation. De retour dans ma banlieue, je prenais régulièrement de ses nouvelles...

J'ai changé de location, mais je suis restée dans son département, j'ai fait le voyage pour l'embrasser, plusieurs années encore, j'ai toujours trouvé Marianne assise devant sa prairie, les yeux noyés dans le vert avec douceur... Malgré les douleurs, les maux des hanches, des genoux, des mains... Son esprit, sa vivacité sont toujours au rendez-vous : racontez-moi Danielle, ce qu'il y a de neuf, que lisez vous, qu'avez vous vu... Et vous Marianne, parlez-moi aussi de ce que vous lisez, ce que vous pensez, comment va votre vie ?

Nos questions et nos réponses alimentent toujours nos entretiens, elle oublie un moment le mal, les tourments, les inconvénients des années...

Je me souviens du jour de notre première rencontre, nous avions parlé avec cette sincérité, cette confiance absolue qui arrive d'on ne sait où, dès les premières paroles... La personne vue pour la première fois, qui vous accueille avec une écoute bienveillante, un sourire presque complice, le reste est facile à dire, à faire, la vie passe entre les mots, de l'une à l'autre... Au bout de nos deux premières heures de bavardage, elle se demandait, comme pour résumer le grand cours de sa vie... Ai-je été une femme docile ? Je ne le crois pas Danielle, je ne le crois pas... Avec mes enfants ai-je été une bonne mère ? Je ne sais pas Danielle, je ne sais pas... J'ai bien aimé ma vie... Nous avons toujours continué à nous raconter les choses essentielles... Et s'il fallait tout recommencer dès le début ? Marianne répondait avec prudence aux questions du début des choses... Bien des interrogations restaient encore sans réponse, il faut être patient dans la vie... Marianne, il y a beaucoup de questions auxquelles on ne répond jamais ? Oui, beaucoup Danielle, je ne sais même pas si j'ai beaucoup appris...

Comment va le monde Marianne ? Il tourne... Bientôt sans moi... Je souriais quand elle me disait ça, mais voyons Marianne, lisez plutôt ce livre, il va vous passionner, et voilà que nous ne nous sommes pas vues ni parlé depuis la catastrophe nucléaire de Fukushima... Marianne, qu'en pensez-vous ? Je vous appelle très bientôt...

Prenez soin de vous, ça compte double pour moi.

A-t-elle pris soin d'elle ? Je suis trop loin pour tout vérifier par le menu, je peux seulement entendre sa voix : voir ses yeux qui brillent, ça sera pour plus tard, dans les vacances, il faut que je lui fasse confiance pour tout le reste... Elle m'avait dit, un jour d'automne où elle allait moins bien, je ne sais pas si j'ai vraiment envie de vivre comme ça...

Marianne, attendez-moi ! Je viens bientôt vous voir... Partager...

La petite barrière

vendredi 25 mars 2011

Fukushima...15 jours après... Hommage...

Des membres des forces d'autodéfense japonaises exposés aux radiations arrivent dans un hôpital de Fukushima pour subir une décontamination... Le 25 mars 2011 (photo prise sur le journal Le Monde)

Image totalement émouvante...

Et inquiétante, car la centrale demeure dans un état précaire, toujours en phase d'urgence, non stabilisée... La situation reste catastrophique (Information confirmée aujourd'hui à 10h30 par l'Autorité de Sûreté Nucléaire Français)

Ce qui leur arrive arrive au monde entier...

mardi 22 mars 2011

Parler pour ne rien dire ?



Ça aussi c'est bien, sortir les mots de la bouche, les faire rentrer dans les oreilles de l'autre, construire une passerelle en alphabet... Pour se dire quoi ?

Sur ce pont suspendu, qui va d'une oreille à une autre, on entend la rivière qui coule en dessous, c'est toujours rafraîchissant, pas besoin d'explication, ni même de compréhension, on est ensemble, voilà ce qu'on veut dire ? De toute façon, les premiers mots ne comptent presque pas, il faut du temps pour dire les choses.

Un de vos parents vous a sûrement dit un jour : tu parles pour ne rien dire. Quand on est enfant, on parle sans compter, forcément, on a plein de choses à dire, mais on ne sait pas comment il faut les dire, dans quel ordre, avec quels mots, on se fait tout le temps reprendre... Donner, reprendre, c'est voler...

En fait, moi je connais plein de gens qui font ça tout le temps, parler pour ne rien dire, c'est difficile de trouver les bons mots pour dire sa pensée. Les plus malins s'en servent pourtant bien pour brouiller les pensées des autres.

Je ne comprends rien de ce qu'il veut me dire, je vois à peu près mais c'est pas clair, souvent j'ai dû remettre les mots à plat pour en trouver le sens, le bon sens ? Ça, je n'en suis pas tout à faire sûre.

Je trouve par exemple que les poètes parlent souvent pour ne rien me dire, aïe, je vais me faire mal voir, le langage poétique, c'est beau comme de la soie, du vent, de l'eau avec des poissons d'argent, mais le sens m'échappe, me glisse entre les doigts... Par exemple : "C'est un brin de verdure où chante une rivière, accrochant follement aux herbes des haillons d'argent... Ici tout est dans un ordre parfait, je suis au bord de la rivière, j'ai les larmes aux yeux... Et là : "J'allais sous ton ciel, muse, et j'étais ton féal..." J'entends que c'est beau, mais je ne vois rien, c'est comme de la musique et dans la musique, il n'y a pas d'image, ça doit être ça, la poésie c'est souvent de la musique de mots pour moi...

Je me suis rattrapée ?



Je fais quelques petites exceptions dans mon histoire, Shakespeare, Molière, je ne m'en lasse jamais, j'entends de la musique et je comprends les mots, ça me transporte, ça m'émeut, c'est grand, c'est fort, ça volcanise, ça éruptionne, ça frissonne... Vous voyez ce que je veux dire ou je parle pour ne rien vous dire ?

Parler pour ne rien dire, souvent ce n'est pas vrai du tout, car on est si peu prêt à écouter vraiment, à comprendre ?

Parler pour ne rien dire, c'est souvent une ruse pour passer au travers, pour fuir le coeur de la question, faire un petit tour et puis partir, une parade en somme, pour déjouer les sens.

L'essentiel, c'est de s'exprimer, finalement, parler et ne rien dire, c'est ne pas se priver de paroles...

On parle souvent à tort et à travers comme un jet d'eau qui sort du robinet, parce que la vie c'est compliqué, quelque fois il y trop de mots, quelques fois pas assez....

Bon, j'arrête là, vous allez vous dire, mais qu'est-ce qui lui prend, elle décortique, elle parle vraiment pour ne rien dire... Ça doit être le printemps qui lui tape sur la tête, il va lui sortir des tulipes, des jacinthes, des crocus par les oreilles, et elle va nous raconter que les mots ont des couleurs, c'est déjà fait, Arthur Rimbaud est passé par là... Salut les poètes !


lundi 21 mars 2011

Ecrire sur rien ?

Jean-Michel Alberola (1995)

Moi qui rêvais d'écrire sur rien, juste avec des mots, sans sujet, sans idée précise, pas de hiérarchie, pas de début, pas de fin... Comme un collier de perles, toutes les mêmes perles, sans fermoir, tu l'enfiles par le cou, et tu comptes avec les doigts chaque perle, sans repère, comme un chapelet, juste pour passer le temps...

Le moment est arrivé. Mais pourquoi tu ne veux rien dire avec tes mots ? J'ai trop de mal, mal à la tête, au coeur, aux neurones, quand je parle de la centrale nucléaire du Japon, j'ai mal partout, quand je parle des sinistrés du Japon, j'ai mal encore, quand je parle de la guerre en Libye, je souffre aussi, quand je vois le monde aujourd'hui, mes douleurs me reprennent... De partout.

Donc tu ne veux pas parler à cause des souffrances ? Oui, je veux aller bien avec le printemps, être en phase avec des projets de paysages non pollués, un monde qui sent la rose au lieu du carbone, une Terre verte et bleue comme une orange... Pas une orange toute ridée.

Tu n'as plus d'idées sur lesquelles tu pourrais parler ? Non, j'ai seulement envie de parler de rien, c'est plus facile, ça me fait moins peur, c'est tranquille, j'ai pas de bobo, pas de pansement, parler de rien ça ne s'use pas, ça ne fait pas de mal à personne.

Tu t'installes là, tranquille, sur ton balcon, dans ton jardin, dans les champs, au bord de la mer... Tu commences à raconter ton histoire à l'envers, tu ne lèves pas le nez vers le ciel, même si le ciel est bleu, ça ne veut pas dire grand chose, tu respires l'air du printemps, mais comment faire ? Je ne sais plus quoi dire pour éviter les idées.

Tu vois, rien ne vient de bien construit, tout va de travers, il y a du rose et du blanc au dessus de nos têtes, du vert et des couleurs dans les bois, les montagnes et les plaines, mais tout se mélange dans les mots, rien n'a une queue, rien n'a une tête... Je ne trouve plus mes mots, c'est trop difficile de construire, tout s'écroule tout le temps, il faut recommencer à réfléchir, je n'ai plus de courage, je suis fatiguée, je veux écrire sur rien, ça repose.

Mais voyons, reprends-toi, on ne va pas mourir tout de suite, les vacances approchent, à part au Japon on va pouvoir aller partout, bon, peut-être pas en Libye, à Haïti, en Afrique ça bouge aussi, mais il reste encore beaucoup d'endroits pour bronzer, se laver les pieds dans les rivières, prendre un bon bain dans les vagues émeraude, tu exagères tout.


Tiens, je vais écrire sur les couleurs, je ne vais pas parler du blanc, ça fait trop penser aux nuages radioactifs, je vais sauter cette couleur-là, je vais vous parler du rouge, ah non ! Ça fait penser au sang, au malheur, au deuil... Bon alors le vert, ça va le vert ? Oui, ça reste une bonne couleur bien que... En Amazonie, ils vont bien être obligés de la rayer de leur vocabulaire, on abat tout ce qui lui ressemble... Oui, c'est vrai, je vais raconter en bleu, surtout pas, c'est la couleur de l'eau, du ciel, avec eux on n'est sûr de rien... Il vaut mieux attendre quelques décennies pour en parler...


D'accord, le jaune ça va ? Parfait, rien à dire.

Alors quand tout est parfait, tu n'as plus rien à dire ? Si, justement, avec tous les espoirs qu'il y a dedans, les mots reviennent comme des torrents, je me dépêche de ne plus rien dire, avec l'espoir, ça va se bousculer au portillon, encore des histoires, des trois fois rien, plein de mots, beaucoup trop peut-être, alors pour les trois fois rien, il y a des milliers de mots qui viennent et pour les catastrophes, plus rien ?

Oui, plus rien, plus d'après, puisqu'on ne sera plus là pour en parler, vaut mieux se taire tout de suite, attendre...

Je vais guetter à ma fenêtre une toute petite chose, pleine d'espoir, pour vous en parler... Je trouverais bien des couleurs dont on n'a jamais parlé, ou je vais diluer les anciennes... Avec l'espoir tout est possible.

Attendez un peu que je mette mes lunettes... Mes jumelles...




mardi 15 mars 2011

Les rideaux blancs...


Il y a quelques années, l'idée me vint de confectionner pour toutes les fenêtres de mon appartement des rideaux blancs, qui ne devaient servir qu’à protéger mon tapis et mes meubles des rayons du soleil.

Depuis toujours j’avais vu ma mère faire de même, tirer ses rideaux au premier soleil, tout au long de la journée elle choisissait la lumière tamisée, douce, intime et chaude… Elle me disait : le soleil, ça blanchit les meubles et les tentures.

Quelle drôle d’idée, me dit ma cousine, moi qui adore le soleil, je ne vais pas choisir de vivre dans le noir pour protéger mes meubles. J’avais trouvé sa réaction bien ajustée à la question, et comme nous étions en hiver, j’avais presque abandonné l'idée de faire les rideaux… Mais le printemps est arrivé et je me suis dit : ça va blanchir mes meubles...

Un jour, dans le sud, chez une de mes amies, j’étais restée en arrêt devant la beauté d’un drap de lin qu’elle avait tendu à la fenêtre d’une des chambres de sa maison, léger, presque transparent, lumineux et protecteur… Un vaste écran de lumière, mouvant et frémissant au moindre vent… Quelle beauté… Je l’ai gardé en mémoire pendant des saisons entières.

Au printemps, dès que les bourgeons se mirent à pousser aux branches de l'abricotier, juste en bas de chez moi, l’image de la lumière tamisée m’est revenue, l'idée du rideau du sud m'a reprise.

En arrivant au Sacré Cœur, dès la sortie du métro, j’ai eu du mal à me frayer un chemin parmi les touristes, je pris une photo ou deux, un café allongé au bistrot du coin, histoire de me mettre le cœur à l’ouvrage.

Pour le choix du tissu, tout me fut difficile, j’avais tourné et retourné la question, visité et revisité tous les marchands du marché Saint-Pierre pour trouver une belle toile, unie, blanche, pas trop fine, pas trop épaisse, je suis restée un après midi entier à palper les tissus, sans pouvoir me décider.

La toile était-elle vraiment bien adaptée ? Il me faut une grande largeur, du coton bien sûr, à 100 %, qui passe en machine à laver, pour l’entretien, le lavage, le repassage, ça va marcher ? Pas question de teinturier. Mais quand l'idée est arrêtée tout paraît possible, vous avez remarqué ça ? Dès que vous avez conclu l'affaire avec tous vos neurones, impossible de faire marche arrière, vous répondez oui à toutes les questions qui peuvent se poser. J'avais jeté mon dévolu sur un coton assez épais, qui avait de la tenue, la couleur parfaite, du coton garanti... Un sans faute… Allez, au travail.

Les mesures, vous n’imaginez pas la galère, au quart de millimètre près, plus les coutures, il ne faut rien oublier, 1 cm de chaque côté, faut-il prendre une hauteur, dans quel sens faudra-t-il prendre l'ouvrage ? Même quand on a atteint l'âge de raison, quand on commence quelque chose pour la première fois on reste une débutante, mais j’avais de l’audace…

Autrefois, maman me disait : mais bien sûr, tu prends une hauteur, ou deux, je ne comprenais jamais rien… Aujourd’hui encore, il faut que je réfléchisse pour prendre la décision, en matière de couture je suis restée une figurante très longtemps.

J'ai débuté à la perfection, j'avais tiré un fil qui me permettait d’aller droit, tout droit.

Je ne vais pas vous révéler toutes les étapes de la confection, mais au bout du compte toutes les fenêtres furent faites en moins de temps qu'il ne faut pour le dire... Ou presque.

Mes rideaux firent leur office, un bon moment, dès le printemps, tirant ici où là, la chevillette cherra, je calmais les ardeurs du soleil

Puis vint le moment de les laver... Je vais encore attendre un peu... Et la poussière s'accumula.

De la machine à laver, j'entendais le bruit de la rivière, je me faisais un sang d'encre, car ce que je craignais, arriva... Après un tout petit tour d'essorage, le plus faible possible, le premier rideau en sorti blanc impeccable... Et tout froissé.

Mon fer à toute vapeur n'en vint jamais à bout, ma force musculaire pareillement, j’ai tenté double lavage à chaud, à froid, le rideau avait des plis pour le restant de sa vie.

Au moment de l'achat, vous vous souvenez, j'avais pourtant répondu oui à toutes les questions... Mais quand l'idée est arrêtée...

Vous l’aurez compris, je suis au pied du mur, recommencer ou repasser, donner chez le teinturier, pas question, ça va me coûter le prix des neufs… Je veux tout faire à la maison avec facilité, mais le tissu que j’ai choisi est le contraire du bon sens…

Alors ?

Le mieux, c’est que je les refasse, avec un tissu plus fin, comme un drap, ça se repasse comme un mouchoir de poche et puis c’est beau. J’en ai déjà refait un… Pour les mesures, j’ai fait vite, pour la couleur vite aussi, pour l’exécution, j’avais beaucoup appris, deux heures y ont suffit…

Je suis enchantée de ma nouvelle idée, j’ai déjà fait miroiter le soleil dans ce nouveau voile de mariée…

Le soleil peut taper à mes fenêtre, je sais comment le recevoir, tout en douceur, tout en blancheur, comme dans le Sud…

Le Japon saigne... Je pense à lui...


Toutes mes pensées vont vers ce peuple, qui subit la mort, la terreur et l'angoisse...

Amis japonais, tenez bon, ne perdez pas courage, nous sommes près de vous...

Ce qui vous arrive arrive au monde entier...

vendredi 11 mars 2011

Le printemps fait le trottoir en bas de chez moi !


Pas de soleil, tant pis, juste aujourd'hui que j'avais l'appareil photo en bandoulière, pas de chance ! Mais j'ai pris les couleurs, ici et là il y en avait beaucoup, il suffit aussi de lever la tête, sur toutes les fenêtres ont voit des jaunes et puis des bleus... Tiens, je n'avais jamais remarquée celle-là...

Je me suis dit, voyons, fais un effort, regarde encore, il y a sûrement quelques chose qui t'a échappé ? Il y a sûrement de belles choses à photographier autour de chez toi...

En regardant de près, j'ai vu que tout m'avait échappé, j'ai des milliards de choses à voir, là, le petit immeuble est terminé depuis longtemps et voilà qu'aujourd'hui je me mets à penser à ce qu'il y avait avant lui, un couvent, avec une petite chapelle, je me demande si elle existe encore... Il y a des années, je voyais des soeurs en civil aller et venir dans la rue, elles faisaient des soins infirmiers... Et puis, vous savez ce que c'est, elles ont vendu au plus offrant.

Leur immeuble était juste à côté d'un jardin, toujours en vie actuellement, géré par une association de mordus de nature. Quand je passe devant ce jardin, dont les grilles sont toujours fermées, j'ai envie de pleurer, en ce moment je vois les pivoines qui arrivent, bien entretenues par les jardiniers... Les arbres fruitiers, pommiers, pêchers attendent encore un peu d'entrer dans la danse. En fait, un jardin comme il y en avait quelques centaines dans le coin, mais dont on fermait la porte derrière soi, après avoir sonné, pour faire une visite aux propriétaires. ...

Je me souviens avoir entendu dire que l'immeuble de 11 étages où j'habite était habité par des petits jardins privatifs... Vivaient là des familles, dans des petites maisons dites "ouvrières"

Ce matin, en passant en revue le printemps des rues, je fais coeur triste et gai...


Dans le petit enclos qui pousse au pied de ma maison, juste sur le trottoir, une toute petite île de campagne, même pas la place d'y mettre un mouton, l'abricotier dont je vous ai parlé l'été dernier donne des fruits qui ont le goût et l'odeur de la rose... Il est tout blanc, ses bras dépassent largement le petit grillage qui l'entoure, il fallait presque baisser la tête l'été dernier pour passer à côté de lui, il y avait un tout petit air de gaîté à le voir prendre ses aises sur le trottoir.




J'ai continué mon chemin, j'ai acheté les oranges Maltaises qui arrivaient juste de Marseille, pour faire ma confiture, elle brillaient par leur belle couleur, la Tunisie embaumait le feu rouge qui se trouve juste à côté...

Je connais pas loin, derrière un grand mur, un énorme cerisier qui fait de belles cerises, beaucoup trop hautes et privées pour la confiture... Mais quand il tremble sous ses fleurs, c'est un tableau ravissant. Il ressemble à un saule pleureur, mais il ne pleure pas assez bas pour que je cueille ses cerises, je lève les yeux, c'est tout, mais c'est déjà beaucoup.


Plus loin, dans une cour, j'ai vu des feuilles qui poussaient dans un seau, des fleurs à venir sans doute ?

Petit à petit l’étau se resserre, les jardins disparaissent, remplacés par des maisons qui promettent des espaces verts sur le béton des garages...

Quand on habite en ville, en grosse ville, il faut chercher le printemps avec courage, il est là comme partout, il faut ratisser chaque recoin. Bien sûr il reste les talus municipaux, les arbres des places, les fenêtres des immeubles et des maisons, les petits jardins se cachent derrière les occultations serrées serrées, même avec un seul oeil, on n'arrive pas à voir au travers... Il ne faut pas se décourager, finalement la grande ville, bien dense, bien épaisse, vous force à ouvrir les yeux.

En septembre, quand je parcours la campagne, je ne fais pas beaucoup de chemin, à chaque pas c'est une surprise, je tourne la tête comme une girouette sous la brise légère, attention, tu vas rater le pommier, voyons, regarde la vigne, le soleil l'éclaire comme jamais, entends le bruit de l'eau, avec ses algues vertes qui ne sont pas un bon signe, t'as envie de t'y baigner... Je fais des provisions de beauté, j'inscris ça dans mes gènes, et quand le printemps arrive, sans que je le vois vraiment, je repense à tout ce que j'ai vu... Attends un peu, lève les yeux, le ciel est bleu...

Comment vais-je faire l'année prochaine pour vous parler du printemps, si je vous dit tout maintenant, il faut que je garde des secrets, des odeurs, des couleurs pour vous en mettre plein la vue, joyeusement.

Je me dits : regarder, c'est résister, alors je résiste, je sors même l'appareil photo, on est deux... Une petite armée bien pacifique...

À la campagne, bon printemps, trempez vos yeux dans les rivières, dévalez les collines, regardez le ciel, attention où vous mettez les pieds, les violettes vont vous en vouloir... À la ville on se débrouille comme on peut, ça sort de terre aussi, un peu moins joli mais c'est le printemps tout pareil ! Cette année je me mets au vert, je fais un bac aromatique sur mon balcon, je vais en manger jusqu'à l'automne...

La vie passe comme un éclair !

dimanche 6 mars 2011

Le Kapouchnik ?

Le Kapouchnik, c'est quoi ? Une revue de l’actualité d’après les journaux de la semaine, ironique, mordante et caustique, préparée en une journée par une vingtaine de comédiens.

Inspirés d’une tradition russe (soupe au choux), les Kapouchniks ont toujours lieu à Audincourt, car cela nécessite une importante costumerie. Pourquoi Audincourt (Doubs)? Le Théâtre de l'Unité y habite, dans une jolie maison, accueillante, mise à sa disposition par la municipalité. Il se passe toujours quelque chose d'intéressant avec le Théâtre de l'Unité... Ils adaptent, ils inventent, ils démontent et remontent tout autrement, un théâtre riche (!) et décoiffant...

Donc, l'autre soir j'y étais, pas seule... : nous étions à peu près 400 spectateurs à attendre les trois coups. Des gens venus de tous les coins du département, il paraît même que, comme la représentation du Kapouchnik a lieu une seule fois par mois, les réservations sont complètes 1h après l'ouverture de la location... Vous dire le succès local !

Ce soir-là, tout le monde comptait bien sur une actualité rebondissante et incroyable, pour rire et même être ému... On avait en tête les révoltes des pays arabes, comment allaient-ils s'en sortir ?

La salle de théâtre, aménagée à toute vitesse dans la journée, 400 fauteuils en plastique, avec le nom du spectateur inscrit sur une étiquette autocollante... Grande classe, comme à la Comédie Française quant on avait une loge à son nom...

Les spectateurs passent donc dans les rangs à la recherche de leur nom, c'est très amusant, pas question de resquiller, il y a une liste d'attente... Tout le monde ne pourra pas rentrer ? On se serre et tout le monde sera assis...

Moi qui avait vécu l'agitation de la préparation du spectacle, totalement à l'écart, j'avais hâte d'en voir le résultat...

Juste après la cuisson au court-bouillon !

J'avais suivi par contre la préparation du repas qui devait régaler toute la compagnie, un festin de roi, poitrine de veau farcie, j'ai pris les photos, regardez, on dirait la Tour Eiffel... Magnifique ! En cuisine, la Président de l'Association qui mitonne comme une cheffe !!

Juste avant le passage au four !

Je peux vous dire aussi que c'était délicieux, on a failli se battre pour le rab... Imaginez trente à table, joyeusement, après le débriefing des patrons... Je n'ai pas fait de photo de la table avec tous les convives, car je n'avais plus de batterie dans mon appareil photo !

Je reviens au spectacle, on y apprend des choses, tous les sketches sont relevés dans les journaux de la semaine, tout est vrai, la dérision est de mise, la fin fut onirique, une pyramide d'acteurs drapeaux en mains, faisaient entendre leurs cris de victoire sur la tyrannie, un grand moment... Debout devant les chaises en plastique, la foule en délire applaudissait cette performance.


Il y avait même des drapeaux que je ne connaissais pas... Dans l'effet dominos...

Vous l'avez compris, le Théâtre de l'Unité (créé en 1972 de la rencontre de Jacques Livchine et Hervée de Lafond) tourne dans le monde entier, est engagé du côté des humains, pas forcément les plus riches... J'en connais une qui leur ressemble un peu, c'est Ariane Mnouchkine, tout est prétexte pour être près des gens, jouer Shakespeare, fêter les anniversaires : "Les 80 ans de ma mère", retourner les plaques, Opération déboulonnage" des rues où figure le nom de Monsieur Thiers, dans les villes avoisinantes, en costumes de Louise Michel et Rosa Luxembourg... La police (bonne enfant) n'y a rien compris quand elle a pris les noms des manifestantes... Il y a très longtemps, ils ont même joué dans une 2 CV !

J'ai serré la main à Jaques et à Hervée, j'étais émue, eux qui en avaient fait de toutes les couleurs, ils étaient encore toutes oreilles dehors, impatients, intéressés, chaleureux, prêts à recevoir la nouveauté... Rien ne paraissait de leur longue vie théâtrale, quand il accueillent les bras ouverts, c'est toujours pour vous écouter avec énormément de simplicité...

Allez sur leur site, régalez-vous... Partez avec eux dans tous les sens...

mercredi 2 mars 2011

Ma crise !


Mon blog, au début, je me suis dit : tiens, voilà c'est le bon moment pour moi d'écrire un peu et de montrer mes photos. J'aime beaucoup la photo, voir du bon oeil, montrer ce que je vois, avec ces angles-là. J'aime bien écrire des formats courts, resserrés, essayer de dire en quelques mots : idées, émotions, enthousiasmes, et même rage et colère. Parler du monde qui m'entoure, des gens que je rencontre, c'est ma vocation. Le tout petit surfil dans le bas d'un vêtement, la très petite paillette qui fait scintiller un décor, ce que je vois, ce que j'entends et qui me touche, voilà ce que j’ambitionne de montrer...



Je m'étais dit aussi : voilà une belle occasion d'arranger les mots, d'écrire dans le vent, de semer à la volée quelques idées sur la vie, ça me fera travailler les méninges... Car au début j'étais seule, je ne savais pas du tout comment ça marchait, comment, pourquoi des lecteurs vous trouvaient, comment ça se faisait qu'on arrivait jusqu'à moi ? Le mystère reste encore total...

Allez, puisque j'ai décidé de parler sous penthotal, je dis tout : au début, j'avais mis des petits compteurs de visiteurs, des statistiques, des horloges, des compte-pages, des mouchards, des pistes... C'est terrible ces trucs-là, ça peut même finir par me faire une grosse tête : tiens dis-donc, mon beau blog est rudement visité, je vais devenir célèbre, pourvu que les chiffres augmentent, qu'on dise du bien de moi sur le Net... Des bêtises bien sûr, mais qui vous tiennent en haleine... J'ai tout de suite vu que je ne voulais pas ça... J'ai enlevé toutes les épines de mes doigts... Les compteurs, les statistiques, les compte-pages, les mouchards, les pistes... Et j'ai repris mes bavardages, bien plus tranquille, je ne fais plus les comptes, je compte sur mes visiteurs les plus sympathiques et voilà tout ! La vie est belle, il faut passer inaperçue, presque...

Tout au commencement j'ai parlé de Venise, car j'en venais, j'y retournais, mais bien vite j'ai épuisé le sujet, j'ai même piqué des rages... Je ne me souviens même plus comment j'ai trouvé les gens qui en parlaient, avec amour, avec passion, de passionné en passionné j'ai remonté un peu la filière, et j'ai bien vu qu'ils étaient nombreux, bien assez nombreux... Je n'avais plus rien à rajouter, tout avait été dit, tout avait été montré...


Après, je me suis dit : écris donc ce qui te passe par la tête, les toutes petites choses de la vie, laisse Venise, il y a déjà beaucoup de monde sur le coup, il y a de belles photos, de belles histoires, et puis les amoureux trouvent toujours les mots pour le dire et le redire... Tu parleras de Venise quand tu en auras envie, de temps en temps, ça suffit bien.

Alors, j'ai fait comme je suis, je me suis mise à parler des trois fois rien que j'aimais bien, de ceux qui me touchaient, j'ai essayé de leur donner un peu de sens , mon sens. J'ai bien vu que je n'étais pas toute seule à aimer les histoires du quotidien. J'ai commencé à faire des rencontres avec les gens qui venaient lire mes petites paillettes et mon fil de bâti...Des amis un peu spéciaux, virtuels bien sûr, mais si sympathiques, aussi mystérieux que les gens de la rue, un jour ici, un jour ailleurs, ils circulent librement... ça m'a réjouie, je me suis sentie moins seule.



Et puis après, le partage est venu, puisque des gens sont venus lire mes pages, s'inscrire chez moi, comme pour me dire : j'aime bien ce que vous dites, ça me parle, et très vite il m'ont fait des bises et m'ont tutoyée, on entrait dans le vif des sujets, comme si on se connaissait depuis toujours.

Je m'impose juste une règle d'intimité, je ne parle jamais de ma vie vie très privée, ça laisse de la place pour un anonymat bien raisonné... Pas la peine non plus d'en dire trop, c'est jamais assez... Si je ne raconte pas ma vie dans tous ses plis, par contre, quand j'écris, je dis sincèrement ce que je pense, c'est mon credo pour que je m'y retrouve. J'essaye d'aller chercher loin en moi ce qui me tient à coeur. Souvent, j'ai rêvé d'écrire sur rien, et de le faire bien... C'est très très difficile, ça sera pour beaucoup beaucoup plus tard.

Les larmes, les sourires approchés de près, à ma hauteur, les yeux dans les yeux, c'est ça que je vois le mieux. À ce moment si précieux de la rencontre, si unique, si humaine, je sens monter en moi une compassion et une solidarité véritables. Créer du lien, c'est ça que j'aime faire en premier... Dans l'ascenseur, sur mon palier, dans le métro ou sur le trottoir, les paroles échangées ne sont jamais inutiles, elles font du bien à tout le monde et à moi la première, rien n'est jamais tout à fait désintéressé...

Souvent, j'ai eu envie d'arrêter mon blog, pour des raisons raisonnables, ça ne sert à rien, c'est tout papier chiffon à côté des choses graves qui se passent dans le monde, et même la mort de mon voisin.

Comment faire pour avoir des idées tous les jours et en parler ?


Je ne sais pas, ça vient tout seul, les plus petites choses arrivent en premier, le cinéma, les livres, le tricot et la couture, les promenades, les concerts, les vacances, toutes les dentelles de la vie...

Mais souvent je me dis, à quoi bon ?

Le jour ou je vois tout en rose, que tout explose, comme aujourd'hui avec le printemps qui est en bas de chez moi... J'ai de nouveau les idées claires, le soleil, les bourgeons, le rose, le bleu et le violet, ça va faire des mots pour les beaux jours...


La belle vitrine du fleuriste de la rue Montorgueil.