L'ange de la fontaine publique
Quand je suis arrivée à Reims, j'ai tout de suite vu l'ange doré, rutilant, étincelant, presque neuf, il dansait sur une jambe comme le génie de la Bastille qui tient à bout de bras sa torche enflammée, les ailes déployées... À Reims, l'ange doré est une femme qui tient une couronne de lauriers dans ses mains, elle virevolte sur une grande colonne de pierre qui est une fontaine... À la place de l'eau, il y a des fleurs plantées dans les bassins... À Paris, le feu, à Reims les lauriers et les fleurs...
Au bout de la grande avenue piétonne, bordée de restaurants multiples et de grands cafés, on arrive face à la cathédrale... On voit tout de suite qu'elle mérite bien son surnom de "cathédrale martyre", 25 obus lui sont tombés dessus pendant la guerre de 14/18, le chantier de restauration débute en 1919 et dure encore aujourd'hui...
La magnifique, la martyre...
Mais pour son histoire, les dates, les rois, les symboles, tout ce que vous voulez savoir sur elle, voyez les livres, les dictionnaires, les encyclopédies et surtout Internet, ils savent tout, tout, tout, mieux que moi, mille fois mieux que moi.
Ce que j'ai vu, ils ne le savent pas, ce que j'ai éprouvé, je vous le dis maintenant, les beautés de la cathédrale, il faut du temps pour les voir, les observer finement, les incorporer, les emporter avec soi... Elles donnent tout de suite envie de tout comprendre, de tout connaître des représentations, vous voudriez que chaque sculpture vous soit aussi familière que des visages que vous apercevez sur une vieille photo jaunie, vous devinez le grand-père de vos parents, la grand tante de votre cousine, où sont-ils, que font-ils, comment sont-ils mis ? Comment les sculpteurs du XIIIe siècle (principalement) ont-ils fait pour nous éblouir encore à ce point, comment ont-ils fait pour m'émouvoir aussi profondément ?
Une émotion intense vous saisit d'abord par les yeux, il faut s'approcher, encore plus près, demeurer sur le parvis, lever haut la tête pour admirer la statuaire de la cathédrale, il y a 2303 statues.
Un des 22 anges des arcs-boutants
Sur les côtés, dans les pinacles, au bout des arcs-boutants, il y a 22 grands anges blancs qui tiennent des symboles dans leurs mains, la cathédrale pourrait bien s'envoler si toutes les ailes de tous les anges disséminés un peu partout dans la pierre se mettaient à battre.
L'ange à côté de Saint Denis qui sourit à l'autre ange
Détail
Détail de l'ange qui sourit sur le portail de gauche
Tout le monde connaît les deux anges jumeaux qui sourient, en façade, sur le portail de gauche, l'ange à côté de Saint-Denis (?) et sur le portail principal, l'ange Gabriel de l'Annonciation, à côté de la Vierge Marie. Ils sont dans la même symétrie, à un portail d'écart, voyez leur sourire, l'ange de gauche tourne légèrement la tête vers l'ange qui encadre Saint Denis, l'ange Gabriel à droite incline plus discrètement la sienne, vers la Vierge, ils ont la même coiffure bouclée, portent le même vêtement, une longue tunique serré à la taille qui retombe en plis jusqu'aux pieds ; une cape souple, fermée par une agrafe, couvre leurs épaules, l'ange Gabriel n'a qu'une aile et retient sa cape d'une main, l'ange de gauche a ses deux ailes déployées gracieusement.
L'Annonciation avec l'ange jumeau
Quand je me suis trouvée juste à leurs pieds, j'ai compris qu'ils étaient irrésistibles de beauté et de grâce, la grande simplicité des représentations est totalement émouvante. L'Annonciation si épurée, si touchante : un ange qui sourit à côté d'une Vierge jeune et gracieuse, elle esquisse un tout petit sourire, son regard va droit devant, elle est vêtue d'une soutane qui part des épaules jusqu'aux genoux et d'une jupe qui descend jusqu'aux pieds, un tout petit bout de pied dépasse, un foulard recouvre sa tête et laisse voir ses cheveux sur les côtés.
La visitation
À côté de l'Annonciation, la représentation de la Visitation : la Vierge et Elisabeth, un travail plus en résonance avec les canons antiques, les tissus sont plus lourds, plus fournis, les deux femmes sont magnifiques, les sculpteurs on su marquer leurs âges respectifs...
Sur les portails de la façade, j'ai cherché la reine de Sabbat, impossible à trouver, il lui manquait la tête, plus de membres, qu'un corps enfoui sous les délabrements de pierre... Il faudra revenir dans quelques années pour la reconnaître, sous les couteaux des tailleurs de pierre.
Abraham et son fils
Le fils avec son visage tendu
Tout à droite du portail principal, Abraham et son fils pieds et mains liés à côté des prophètes, ces autres grandes figures de l'histoire Sainte, dépouillés à l'extrême, les visages tendus, personne ne peut rester indifférent à tant de virtuosité poignante.
Beaucoup plus haut, à 50 mètres, David et Goliath (5mètres de hauteur) que j'ai devinés... Des formes géantes qui paraissaient si petites...
Un ange
Un ange
Des anges
J'ai parcouru la cathédrale de tous les côtés, j'ai cherché les anges, ils étaient partout, dans les fleurs de pierre, j'entendais leurs bruits d'ailes...
La cathédrale de Reims est la reine des anges, on peut même approcher de plus près pour voir cette inoubliable statuaire dans le Musée du Palais du Tau (résidence archiépiscopale et royale), il rassemble les plus belles oeuvres, déposées après les ravages de l'incendie de 1914. Beaucoup de copies ornent la cathédrale, et c'est un choc incroyable que d'admirer les originaux dans le palais, les statues sont des géants... D'une exceptionnelle beauté.
Statuaire de l'ombre à l'intérieur
Longtemps après la visite, j'ai gardé dans la tête, dans les yeux, dans le coeur, l'énorme chef-d'oeuvre qu'est cette cathédrale, je ne vous ai même pas parlé de l'intérieur, car la cathédrale de Reims c'est d'abord sa statuaire extérieure, mais celle de l'intérieur, toujours dans l'ombre, doit se regarder avec patience (aidé des schémas mis à disposition pour la visite), elle est extraordinaire !!
Avec ses centaines d'anges la cathédrale est donc prête à s'envoler... Dépêchez vous...
Un ange