mardi 10 avril 2012

Il m'a parlé du Paradis !




Le Panier, vieux quartier de Marseille


Je déambulais doucement le long du Vieux Port de Marseille, l'emblème touristique de la ville... Fatiguée, j'avais grimpé toutes les marches qui menaient à la vieille ville : le Panier, du nom d'une de ses rues, encore très populaire, est un des plus anciens et des plus pittoresques quartiers de la ville, avec la mer en toile de fond. Il est agréable de s'y promener, le lieu est bien rénové et même un peu à la mode, j'ai idée que la spéculation immobilière va y faire de bonnes affaires. On y trouve des boutiques d'artistes tels que des peintres, luthiers ou potiers qui proposent des objets insolites, originaux, uniques...Toutes ces ruelles étroites, demeurées telles qu'au Moyen-âge, ressemblent à un décor de film, et les façades des maisons sont pour certaines magnifiques.


Je n'avais donc pas économisé mes genoux, une rue, encore une rue, toujours plus loin... J'ai laissé des tas de trésors pour la prochaine fois. Quand je suis redescendue au Vieux Port, voulant m'y reposer un instant,  je pestais contre la laideur des immeubles rectilignes qui bordent la rive nord du port (détruit par les Allemands en 1943), construits après guerre par l'architecte François Pouillon, les façades sont devenues toutes grises avec la pollution... Aujourd'hui, le Vieux Port est essentiellement un port  municipal de plaisance  La seule activité de passagers correspond aux navettes touristiques qui vont au Château d'If, aux Iles du Frioul et dans les calanques de Marseille. Un bateau restaurant, à quai pour toujours, attire du monde dans ses filets... 



Petite pêche rescapée pour la joie des touristes 



À ma descente du vieux quartier, Notre-Dame de la Garde

Comme j'avais mon appareil photo sur le ventre, pas d'accent, et sans doute l'air hébété, un homme qui se trouvait à la barrière des petites installations portuaires (appelées à disparaître avec le projet Marseille Capitale européenne de la culture en 2013) m’apostropha gentiment : là, c'est le fort Saint-Nicolas, de l'autre côté le fort Saint-Jean, là, vous voyez l'église Saint-Jean, non, suivez mon bras, regardez mon doigt... Il était torse nu, ruisselant de sueur, le visage un peu rouge et  l'accent totalement marseillais. Il faisait un temps d'été, sans mistral. je suivis son doigts et je vis ce qui m'avais totalement échappé, derrière les mats de tous les bateaux qui stationnaient dans le port... Je distinguais les deux forts des XIII et XIVe siècles.


Oui, maintenant je les vois, mais je trouve très laids les immeubles gris de ce côté-ci... Mais non, c'est pas moche, rien n'est moche à Marseille, mais vous verrez pour 2013 ils vont tout arranger, ça sera très beau, c'est tout des hôtels... J'avais vu très vite qu'il y avait une grande différence entre ce qu'il me disait et ce que je voyais... Mais non, se sont des immeubles d'habitations monsieur... Ah ! Oui, mais il y a des hôtels aussi... Vous savez, vous êtes de quelle religion ? D'aucune monsieur... Bon, vous connaissez le Paradis ? Ici ça sera comme le Paradis... Et c'est comment le Paradis, monsieur ? Le Paradis, c'est magnifique, pas de pollution et pas de déchets, et vous savez c'est pour toujours, pour l'éternité, vous vous rendez compte, pas de déchets, quand vous avez envie de manger, vous y pensez et puis hop, vous mangez de bonnes choses rien qu'en y pensant, et puis là (il se frottait le ventre...), pas de déchets non plus, on vous projette un peu d'huile de colza sur le corps et puis rien, pas de déchets, vous vous rendez compte ?... Qu'est-ce qui pollue, madame, ici bas ? C'est les humains... Pas de ça au Paradis, tout est beau, toujours, toujours, voyez ? Moi je suis musulman, je crois au Paradis, c'est dommage que vous ne croyiez en rien, le Paradis ça devrait être pour tout le monde, ah ! Si tout le monde pouvait avoir la même religion... Mais ce n'est pas possible monsieur, vous savez bien... Oui, je sais... On tournait en boucle sur le Paradis, lui qui y croyait et moi... J'ai dû mon salut à un de ses collègues du port qui venait lui donner des nouvelles... J'ai fui, au revoir monsieur, et bon Paradis.


Si ce monsieur ne s'était pas déclaré musulman, j'aurais bien eu l'idée qu'il avait un peu bu, mais... C'est peut-être le soleil du port...



La couronne d'épines


Dans le vieux quartier que je venais de quitter, j'avais assisté à un début de procession du chemin de croix, une grosse cinquantaine de pèlerins chantait doucement, quelques uns avaient revêtu les habits des chrétiens de Nazareth, et la couronne d'épines trônait sur un beau coussin couleur du sang, dans les bras d'un prêtre.. 


C'était bien un jour où les questions se posaient, les désirs étaient forts chez les uns et les autres, l'éternité, le Paradis, la beauté, la bonté...


Demain, je ferai l'autre côté du port, les restos, le théâtre de la Criée, le cours Estienne d'Orves, cette magnifique place à l'italienne bordée de cafés, de beaux magasins, de terrasses au soleil...


Le Paradis, pourquoi pas, moi j'ai trouvé des couleurs qui pourraient bien y faire penser, voyez...


12 commentaires:

D'Art en Arts a dit…

Et si tu m'envoyais un mail et que je vienne prendre un pot avec toi, sur le port ?
kalinorma@gmail.com

Danielle a dit…

Merci Norma, quelle bonne idée, promis juré, si je mens je vais en enfer, la prochaine fois je t'appelle :-)))

Grosses bises du matin.

Michelaise a dit…

Et bien moi, l'ensemble de Pouillon je trouve qu'il n'est pas si laid que cela, il a le mérite de n'être pas trop haut, on aurait pu faire tellement pire, il y a une unité, les façade sont grises mais le jour où on les grattera, elles sont en pierre, et cela sera très agréable, et enfin les arcades sont assez bienvenues quand il fat chaud !! Il faut dire que mes grands-parents y avaient un appartement, relogés après les bombardements et cet appartement avec vue sur la Vierge, juste eu coin en face du pharo, j'en conserve un souvenir ému : pour des gens pauvres, c'était le grand luxe, la salle de bains était immense, la balcon superbe, bref, un vrai bonheur. J'ai toujours regretté qu'ils l'aient vendu !!
Pour le reste, le Paradis c'est effectivement là où on se sent chez soi, n'est-ce pas ?? et attention, va voir Norma plutôt que d'aller en enfer, ce serait dommage de rater le paradis ...

Danielle a dit…

Michelaise, tes arguments sont excellents, parce ce que tout ce que tu dis me touche, tes grands parents avaient été relogés, en toute propriété ? Comment avaient fait les gens pauvres pour l'acquisition des logements, tu le sais ?

C'est vrai, j'ai remarqué que les immeubles étaient en pierre avec de grands balcons...

Tu sais mon impression n'est pas raisonnable...juste en passant c'est un peu court c'est vrai.

Bien sûr pas question d'enfer avec Norma, je serais au Paradis :-)))

Bises Michelaises.

Marie-Josée a dit…

Il faudrait que je retourne un jour à Marseille, car j'en ai gardé un souvenir effrayé lorsque j'y suis passée avec un groupe de filles, mon seul voyage de groupe avec l'école.

Il faut dire que j'avais quatorze ans et que la petite Québécoise que j'étais n'avait pas l'habitude du regard aussi présent de la gent masculine, surtout maghrébine à vrai dire, qui s'était massée aux fenêtres de la salle à manger de l'hôtel. Le souvenir a peut-être grossi les choses.

À trente-cinq ans d'intervalle, comme je ne ferais plus tourner les têtes, je crois que je pourrais sans danger aller explorer la ville de Guédiguian que j'aime beaucoup!

Danielle a dit…

Marie-Josée, à 15 ans toutes les filles ont peur des garçons, non ?

Après ça s'arrange :-)))

Marseille st une ville passionnante, il faut prendre le temps, moi aussi j'ai bien prévu d'y revenir...

Grosses bises du soir à toi.

Marie-Josée a dit…

... Dans mon souvenir, c'était plutôt des hommes! Les garçons de notre âge, c'est une autre histoire et le même groupe d'adolescentes avaient utilisé la veillée pascale de Lausanne pour faire des conquêtes...

Danielle a dit…

Marie-Josée, t'as raison, des hommes et des ados c'est pas pareil:-)))

A ma prochaine Marseille, j'y regarde de plus près...

Bises à toi.

Marie-Josée a dit…

Remarque, c'était en 1976...Cela a peut-être changé!

Bon dimanche! Tu es revenue sur Paris?

Moi, j'y suis en imagination, car je suis arrivée au Côté de Guermantes...

Danielle a dit…

Non, rien a changé à Marseille je crois... Le monde vient du monde entier... C'est riche...

Oui, je suis revenue à Paris, et toi aussi avec Marcel...

Bonne relecture Marie-Josée... Bises du soir.

Michelaise a dit…

J'avoue que je sais pas comment cela s'était passé... en fait, ils n'étaient pas si pauvres que cela puisqu'ils avaient été relogés, suite au bombardement de leur immeuble dans le quartier sainte marthe. Et ils étaient propriétaires de cet appartement au coin du vieux port qui avaient un emplacement sublime !!

Danielle a dit…

Oui, les souvenirs familiaux sont bien loin...pour se souvenir avec précisions...:-)))

Merci d'être repassée, bises fortes du soir.