samedi 6 septembre 2014

Venise juillet 2014... L'enfant perdu... (2)



Le beau guide de Marie-Caroline et les achats gourmands du jour

Moi aussi je m'étais un peu perdue, comme j'aime encore le faire à Venise : je pars toujours sans plan, on verra bien, c'est tout vu...

J'avais tournicoté du côté de la place Saint-Marc, derrière la belle vieille horloge qui marque les heures à coup de marteau pour la plus grande joie des touristes...

Je revenais de l'office du dimanche dans la petite église arménienne, bien cachée sous un porche, à l'abri des regards et des pas, depuis des années je passais devant sans la remarquer. Grâce au joli guide sur Venise de Marie-Caroline Saussier, je m'étais dit : cette année je vais voir ça ! Pour rien au monde je n'aurais raté ce rendez-vous, ouverte un seul dimanche par mois, vous pensez, il faut être à l'heure. Encore un petit coin secret, presque secret à découvrir... Une véritable aubaine...



La coupole étoilé de l'église arménienne

J'avais pris mes repères la veille pour être certaine d'être à l'heure pour l'office, je me méfiais de mon sens de l'orientation légendaire, c'était justement derrière la place Saint-Marc que je me perdais le plus facilement, j'avais pris des photos de la rue des colonnes où règne toujours un silence et une tranquillité inattendus, j'avais fait le tour des pâtés de maisons pour photographier le petit campanile de l'église... J'y étais parvenue...


La rue des Colonnes, déserte...


C'est ici !

Dans l'église ronde et très petite, très peu de monde, quelques touristes comme moi, les prêtres attendaient l'heure, l'encens qui flottait largement dans ce petit espace irritait la gorge, les gens toussaient un peu, heureux d'être là...

Un petit chœur de quatre hommes formait le gros de la troupe chantante, deux laïcs et deux prêtres, le plus âgé des prêtres guidait les choristes les plus jeunes, et puis est venu le prêtre qui officiait avec son bel habit et ses chaussures brodés. Les chants rythmaient les prières et l'encensoir, balancé énergiquement par un jeune officiant, répandait dans l'espace un nuage épais...


La petite église arménienne, baroque


L'ange


La Vierge, l'annonciation gracieuse  du 17e siècle

L'office fut très court, un petit groupe de touristes slaves sauva les meubles in extremis en garnissant les bancs restés vides juste devant l'autel, les pratiquants arméniens ne se bousculaient pas, nous étions entre nous, un office confidentiel : moi, la non-croyante, et à peine une petite douzaine de pratiquants ou curieux...

À la fin de l'office, les prêtres souriants saluaient le petit public, une belle poignée de mains, dont la mienne, une vraie bénédiction...

J'ai pu prendre toutes les photos que je voulais, l'accueil bienveillant des prêtres me l'avaient permis...

L'office terminé, personne n'a traîne et en quelques minutes l'église retrouva sa porte close pour un mois. Dans la petite impasse, personne, alors que la foule, juste dans la rue derrière, se pressait autour des nombreuses boutiques restées ouvertes le dimanche...


Je connaissais par cœur le chemin du retour, juste derrière Saint-Marc, je voulais encore faire une dernière photo de cette belle vue au bout du sotoportego à la colonne qui est sur tous les blogs des connaisseurs... La lumière y est si douce, si magique, ce petit pont reste dissimulé dans une des rues les plus fréquentées du quartier.


La vue magique au fond du sotoportego de la Colonne

Presque arrivée à mon point de départ, je me suis arrêtée devant cet enfant, assis sur une chaise, dans cette rue si passante, entouré d'adultes qui tâchaient de lui parler dans la langue qu'il connaissait : anglais, allemand ? L'enfant se tordait les mains, regardait à droite et à gauche s'il ne voyait pas ses parents revenir, il était perdu, son visage crispé, ses yeux hagards ne trompaient pas, il vivait un cauchemar, perdu dans Venise, haut comme trois pommes, neuf ou dix ans, il poussait des cris si faibles, si petits, que mon cœur se serra...

Il ne connaissait pas son adresse, pas le numéro de téléphone de ses parents, il était tout seul au monde perdu parmi la foule... Il demeurait sur la chaise accablé, remuant seulement la tête comme un métronome, gauche, droite...
Je me suis dit : j'espère que ces gens vont appeler la police, j'ai vu l'enfant qui s'accrochait à l'adulte qui l'avait pris sous son aile, entrer dans l'hôtel avec lui, plusieurs personnes allaient s'occuper de passer les coups de fils, il serait sauvé, c'est sûr, Venise est petite, la police municipale est très présente... L'enfant pleurait... Il ne reprenait pas confiance malgré la main protectrice qui lui caressait l'épaule en essayant de le réconforter.


Quand je me suis retrouvée place S Marc, j'ai cherché partout des parents affolés mais je n'ai rien vu... Rien, rien, l'enfant était perdu. J'espérais bien qu'il ne resterait pas longtemps dans son chagrin pathétique... J'avais poursuivi ma route, le laissant aux bons soins des gens qui l'avaient récupéré...

La détresse du petit garçon m'est restée plusieurs jours dans la tête, j'avais retrouvé cette sensation d'angoisse qui vous prend quelque fois pour mille choses de la vie et qui vous bloque la respiration..

Mais à Venise tout peut vous faire battre le cœur, le petit garçon a du retrouver ses parents et moi je continuais de vivre tranquillement dans les beautés de la Sérénissime, j'avais cette chance, j'en ai largement profité...









Les beautés de Venise... A suivre !